mercredi 31 décembre 2008

re re re suite

30 décembre 2008
le ministre de la Défense Ehud Barak (son nom hébreu signifie «éclair», «blitz» en allemand) l'a
encore fait: un record historique de plus de 200 Palestiniens tués en un seul «Chabbat-éclair» le 27
décembre. Les sondages prédisent à présent 5 sièges de plus à son parti Travailliste aux prochaines
élections législatives de Février. Cela fait 40 cadavres de Palestiniens par siège. Pas étonnant qu'il
promette que c'est juste un début: à ce rythme il ne faudra au parti que 2000 cadavres de plus pour
passer de la misère à la richesse, d'un parti politique mort à une majorité absolue au parlement
comme au bon vieux temps.
Alors pour Barak les nécrologies de Gaza sont affaire de survie politique elles sont collées à la
nécrologie de son parti. C'est la même logique écoeurante qui renvoya l'ancien Premier Ministre
Shimon Peres ( lauréat du Prix Nobel de la Paix etc., etc., ) en 1996 dévaster le Sud Liban et
résoudre une fois pour toute le problème du Hezbollah dans l'opération «raisins de la colère» juste
quelques semaines avant les élections législatives – dans lesquelles il fut vaincu par Netanyahu.
Quand les soit disant Colombes se comportent en Faucons, les électeurs préfèrent les vrais faucons,
suivant la parole talmudique:«Un vrai oeuf vaut toujours mieux que tout ce qui peut y ressembler».
Mais les guerriers comme Barak n'apprennent jamais. Et ils ne sont pas les seuls: deux jours
seulement avant le début du martèlement de gaza, c'était le parti Meretz prétendument de la
«gauche libérale» qui appelait officiellement à une action militaire contre le Hamas. Vous savez,
Meretz: le parti ( lauréat du prix de la Paix de Franckfort etc... etc...) de Amos OZ et ceux de son
espèce, ces pseudo intellectuels qui proclament toujours avoir été contre la guerre précédente. Pas
d'exception cette fois ils sont tous là, droit derrière les bombardiers ou même devant eux.
Plus de 200 cadavres gisant à ciel ouvert derrière l'hôpital de Gaza, qui après plus d'un an de siège
israélien, ne peut rien offrir d'autre à ses patients que des analgésiques de toute façon. Devinez
quel était le gros titre du plus populaire quotidien israélien, Yediot Ahronot le jour suivant: «Un
million et demi de Gazaouis sous le feu?» Vous brûlez mais ce n'est pas encore gagné, le véritable
titre du 28 décembre était: «Un demi million d'israéliens sous le feu». Effectivement, un seul civil
israélien a été tué ce jour là par une rocket du Hamas. De la même manière la journaliste Avirama
Golan dans son Blog de Haaretz consacre toute sa page aux angoisses de son chaton hystérique à
Sderot. Certains journalistes, surtout ceux qui se considèrent importants, ont un redoutable sens
des priorités.
Yediot Ahronoth a eu six chroniqueurs en première page et plusieurs autres à l'intérieur, les pom
pom girls de guerre. Nahum Barnea, un journaliste «important» très apprécié, a exprimé son avis
assez succintement sur le bain de sang: «mieux vaut tard que jamais», Dov Weissglass, étroitement
lié au «processus de paix» ainsi que le précise Wikipédia, a parlé de la même manière, son article
s'intitulait:«n'arrêtez pas» avec un point d'exclamation pour que les choses soient claires. «Il
faudrait que ce soit juste un commencement» conseille-t-il au même gouvernement qui vient juste
de promettre:«ce n'est que le commencement». Miroir, joli miroir! Eitan Haber, ancien assistant
de l'ancien Premier ministre Yitzhak Rabin ( lauréat du Prix Nobel de la Paix etc., etc.,) a recyclé
l'habituelle propagande de guerre de chaque gouvernement israélien destinée à la consommation
domestique: comme toujours, l'opposition de droite est extrémiste et folle, mais nous, le
gouvernement, lançons une guerre modérée, responsable, et maîtrisée. «L'argument politique que
nous aurions pu et du agir depuis longtemps n'est ni vrai ni justifié». Haber se met en mode
pavlovien pour servir le gouvernement.
Gadi Taub, jeune «mainstreamer» ultra conservateur, a écrit un article intitulé: «Démagogie,
Antisémitisme, Ignorance» au contenu trop trivial pour être répété, mais assez bien résumé dans les
premier et dernier mots de son titre. Mais la démagogie de Taub s'efface devant celle de Ben-Dror
Yemini ( un Daniel Pipes israélien) dans Ma'ariv, dans un article intitulé «L'offensive la plus
justifiée qui ait jamais eu lieu» (miraculeusement les mêmes mots utilisés par son jumeau de
Haaretz Ari Shavit pour la guerre du Liban il y a tout juste deux ans), Yemini dessine une droite
ligne de Hitler au Hamas ( ce n'est pas un hasard si les deux commencent par H, tout comme
Hezbollah, Sadam Hussein, et Hémorroïdes), et il explique que «depuis l'idéologie Nazi... aucun
mouvement n'a été aussi dangereux pour la paix du monde que l'Islam politique». Excusez-moi de
citer ces ordures; nous avons besoin d'un démagogue israélien pour instrumentaliser l'holocauste, et
Yemini est né pour un tel sale boulot.
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Au même moment, l'excellent chroniqueur B. Michaël élève lui une voix critique dans Yediot: «Et
revoilà le «déjà vu» de la guerre qui revient périodiquement, le rituel saignement déversé dans la
bassine bouillante qui depuis des dizaines d'années conduit toute la région en enfer. Pour être
honnête, notre âme est lasse de démarquer la guerre du septième jour de la Guerre des Six Jours
en diverses opérations, guerres, batailles, actions, et offensives. En fait il s'agit d'une seule guerre
ininterrompue. Un seul grand abattoir, une guerre d'occupant contre l'occupé, et la guerre de
l'occupé contre son occupant»
B. Michaël sait ce que la plupart des Israéliens ont été entraînés à oublier: que malgré le retrait
israélien, Gaza est toujours occupée, même avant la prise de pouvoir du Hamas, Israël maintenait
toutes les mesures nécessaires à assurer son contrôle sur la Bande: du contrôle direct de tous les
passages frontières vers Gaza, à la fois pour les marchandises et les personnes, jusqu'au contrôle
israélien du registre de la population de Gaza. La seule exception apparente, le Checkpoint de
Rafah est réservée à l'entrée dans Gaza des seuls habitants de Gaza, définis tels par le registre
israélien, et même cela se fait sous supervision israélienne. Mais pour la plupart des israéliens Gaza
est indépendante, souverain empire, qui fut occupé par Israël il y a des lustres, et qui à présent, sans
raison du tout, fait peser une menace existentielle sur ses bienveillants voisins juifs.
Aux nouvelles télévisées du soir, l'écoute attentive notamment de reporters sérieux comme Shlomi
Eldar, peut révéler la pointe de l'iceberg encore immergé des crimes de guerre : une prison gazaoui
a été intentionnellement bombardée, un crime de guerre évident. L'hopital de gaza a aussi subi des
dommages, tout ceci dans une bande surpeuplée dans laquelle la vie a déjà été étranglée par un
embargo sur tout, du ciment au carburant et aux équipements médicaux.
Il y a deux mois, le journaliste Amos Harel a cité un article d'une haute personnalité militaire à
propos de la politique israélienne pour la prochaine guerre, que ce soit au Liban, en Syrie ou à
Gaza: «Il faut utiliser une force sans aucune proportion avec la menace et les actions ennemies,
afin d'endommager et de punir à une échelle qui nécessiterait de longs et coûteux processus de
réhabilitation.»
Un autre général israélien a expliqué que les villages d'où émanaient des tirs seraient anéantis:
«nous les considérons comme des bases militaires» (Haaretz 5 octobre 2008. Les noms des deux
généraux -Pour la Cour Internationale de Justice de la Haye- sont Gaby SIBONI et Gadi
ESENCOT). Quand la guerre a commencé le Général de division de réserve Giora ISLAND
ancien chef du Conseil National de Sécurité a proféré tout cela sans l'ombre d'une honte: « Israël
ne devrait pas limiter ses attaques aux équipements militaires, a-t-il dit, mais doit frapper aussi des
cibles civiles. Les atteintes à la population civile devraient être maximisées parce que pire est la
crise humanitaire et mieux et plus rapidement s'achève l'opération.» Au fait, c'est le même Général
de division, qui a provoqué un scandale il y a tout juste un an , en pressant le gouvernement de
négocier directement avec le Hamas. Ne cherchez ni cohérence, ni intégrité, ni intelligence là où
sont impliqués des criminels de guerre.
* Ran Hacohen enseigne la littérature comparée à l'université de Tel Aviv, traducteur de
littérature allemande hollandaise anglaise, critique littéraire à Yediot Ahronot écrit régulièrement
une Lettre d'Israël sur le site Antiwar.com
(trad. M. Sibony)

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